Tansy Graves

12 ans – Sang inconnu – Retrouvée le 16 septembre 2122

• Qui suis-je ?

Voilà une question que tu te poses souvent. Et, certes, tu ne te connais pas beaucoup – ou, du moins, tu ne te connais plus. Tout ça à cause d’un mauvais coup que tu as dû prendre sur la tête, deux ans plus tôt. D’après les médecins moldus, tu souffres d’amnésie rétrograde. Ou quelque chose comme ça, tu ne te souviens plus bien. En tout cas, depuis l’incident qui a pris ta mémoire, tu as dû te retrouver. Tu tâtonnes encore, parfois. Mais tu as au moins appris à faire corps avec ce qui fait de toi la fille que tu es. Tes peurs, tes passions, tes valeurs, ton visage même... ça prend peut-être du temps mais, peu à peu, tout finit par retrouver sa place dans ton esprit.

La première chose que tu as dû redécouvrir, c’était ton apparence. L’apparence d’une petite fille pâle, avec une chevelure brune et de grands yeux sombres. Cette silhouette ne te disait alors rien, à première vue, mais tu t’es tout de suite reconnue. Tu étais à la fois inconnue et familière. Et aujourd’hui, même si tu t’es habituée à ce physique que tu transportes au quotidien, il t’arrive encore d’être surprise par le reflet qui t’observe dans le miroir.

Tu n'aimes pas beaucoup ton corps. Tes muscles sont trop chétifs, ton visage trop fin... Même ton regard te déplaît ; il donne l’impression que tu es toujours surprise par quelque chose. Fort heureusement, tu n’accordes pas grande importance à l’apparence. Tu es comme tu es, et rien ne pourrait le changer. À quoi bon se lamenter ?

En revanche, tu as plus de mal à accepter ton caractère...

Il y a deux ans, tu n’aurais même pas su te décrire, et encore moins expliquer ce que tu aimes ou non. Tout est venu au compte-goutte. D’abord, tu as remarqué que tu ne savais pas te montrer patiente. Lorsque tu demandes quelque chose à quelqu’un, il te faut une réponse tout de suite. Si tu n’obtiens qu’un piètre silence, la frustration qui en résulte peut te rendre exécrable. Tu te plains beaucoup, également. Et même si tu cherches à t’améliorer, à retenir les mots acerbes qui te viennent... Eh bien, parfois, ta langue se délie toute seule et toute ta mauvaise humeur se déverse autour de toi sans que tu puisses l’en empêcher. 

Par ailleurs, l’amnésie qui t’a frappée il y a deux ans t’a privée de presque tout ce que tu connaissais. Le monde te semblait nouveau, presque effrayant... Tu t’es renfermée face à cette vague d’inattendus.  Ton ignorance t’a amenée à observer ton environnement avec attention, aussi bien les paysages que les personnes qui évoluent autour de toi, sans jamais te mettre en avant. S’il fallait te décrire en un mot, tu te dirais « contemplative ». Tu aimes rester dans un coin pour écouter les gens discuter. Tu participes rarement aux échanges, et ça te convient parfaitement. Parler te semble une perte de temps ; tu préfères apprendre à connaître les autres plutôt que de leur expliquer ta façon d’être.

Curieusement, tu attires beaucoup la sympathie d'autrui. Tu ne fais pourtant aucun effort pour te montrer avenante. Tu ne souris que très rarement, tu soupires souvent, et tu te cloître toujours dans un coin reculé sans jamais faire entendre le son de ta voix.  Et, malgré tout, les gens aiment venir te voir. Toi, tu aimes les écouter. Tu aimes connaître leurs secrets. Mais, surtout, tu aimes être la personne à qui l’on se confie. Par contre, ils n'aimeraient sans doute pas te connaître, toi.

Personne n’imagine ce qui te passe par la tête. Toi-même, souvent, tu ne comprends pas. Tu ne t’estimes pas peureuse, et pourtant un simple bruit peut te faire sursauter. La vue du sang peut te provoquer des crises d’angoisse. Tu ne supportes pas non plus l’obscurité. La nuit, tu mets des heures à t’endormir. Et lorsque tu t’endors enfin, d’innombrables rêves viennent te hanter. Parfois, ce sont d’horribles cauchemars sanglants qui te rendent visite. D’autres fois, il ne s’agit que de songes énigmatiques, qui te laissent toujours une drôle d’impression au réveil. Des visions te brouillent même l’esprit en pleine journée. Des intuitions soudaines te dictent d’agir de telle ou telle manière, sans pouvoir l’expliquer. Tu évites de raconter tout cela autour de toi, de peur qu’on ne te prenne pour une folle.

Ainsi, comme tu peux le voir, il y a beaucoup de choses à raconter sur toi. Et dire que tu en connais si peu à ton propos ! Qui sait, peut-être découvriras-tu d’autres facettes de ta personnalité à l’avenir ?

• Quelle est mon histoire ?

L’amnésie qui t’a frappée il y a deux ans n’a pas détruit tous tes souvenirs. Parfois même, des flashbacks te rattrapent, et te permettent ainsi de te remémorer certaines choses de ta vie d’avant.

Tu ne te souviens plus du visage de tes parents biologiques, ni de leurs noms. Tu ne sais même plus s’ils étaient des sorciers ou des moldus. En revanche, tu te rappelles de certaines choses : ton père travaillait dans un bureau – il te l’avait même fait visiter, une fois –, il ne se disputait jamais avec ta mère, et cette dernière rêvait d’avoir un autre enfant. D’autres images te reviennent aussi en tête. Une chasse aux œufs de Pâques organisée dans votre jardin. Une balade dans les rues de Londres. Un voyage à New York, où tu avais amusé la galerie en imitant la Statue de la Liberté... 

Mais voilà, tout cela vient d’une autre vie. Aujourd’hui plus rien n’est pareil. Quelque chose a dû se passer, sans aucun doute, mais tu ignores quoi.

On t’a découverte un beau matin de septembre, évanouie contre l’une des pierres tombales d’un cimetière anglais. Blessée, tu as dû rester plus d’un mois à l’hôpital. Durant cette période, des policiers ont enquêté sur toi, ont tenté de découvrir qui tu étais et ce qui t’était arrivé, mais sans succès. Tout ce qu’ils savaient, c’était que tu étais âgée d’environ dix ans. Et puisque tu n’avais plus d’identité, ils ont dû te trouver un nouveau nom... malheureusement, ils ne sont pas allés chercher très loin. Ton nom de famille, Graves, te vient de l’endroit où l’on t’a trouvée, et ton prénom, Tansy, te vient des fleurs jaunes qui étaient en fleur ce jour-là. Les tanaisies.

Puisque tu n’avais nulle part où aller à ta sortie de l’hôpital, tu as été prise en charge par l’aide sociale à l’enfance. Tu es passée d’un foyer à un autre, découvrant des familles d’accueil et les oubliant presque aussitôt. Cette instabilité n’a pas aidé à ta guérison. Tu devais reconstruire ta mémoire, mais on t’empêchait de créer le moindre point d’ancrage dans ta vie. Alors, tout est demeuré flou. Tu passais à travers ton existence comme si elle n’avait pas le moindre sens.

Et puis, tu as rencontré Jeff Turner et son épouse, Sybil James-Turner. Ils t’ont tout de suite adorée, et ont même fait la demande pour être tes responsables légaux jusqu’à ta majorité. Voilà plus d’un an que tu vis à leurs côtés. Parfois, il t’arrive de les considérer comme tes parents, du moins jusqu’à ce que Jack pointe le bout de son nez. Jack est le fils biologique des Turner, et son passe-temps favori est de te rappeler que tu n’es qu’une pièce rapportée dans leur quotidien. Ses remarques te blessent souvent, mais tu fais avec.

Il y a quelques mois, enfin, tu as découvert que tu étais une sorcière par le biais d’une lettre. Peut-être le savais-tu avant, peut-être l’a-tu oublié. Quoiqu’il en soit, cette annonce t’a perturbée au plus haut point. Toi qui commençais à peine à t’habituer au monde moldu, il te faut désormais t’approprier une toute nouvelle culture. Mais, par chance, tu n’es plus seule pour affronter tout ça. Jeff et Sybil comptent bien t’accompagner dans cette aventure inédite.

Une nouvelle vie t’attends. Tu rencontreras des gens, tu apprendras des choses, et tu te découvriras encore plus. Un jour, sans aucun doute, tu pourras lever le voile sur ton passé. Mais en as-tu seulement envie ? L’avenir nous le dira.

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